L’église San Giovanni Battista Carbini date du XIIe siècle. Archéologues, chercheurs, historiens ou amateurs d’art s’accordent à écrire que cet édifice religieux est un véritable joyau de l’art roman en Alta Rocca. Elle se distingue non seulement par son architecture mais également par sa légende liée au culte qu’on y célébrait au XIVe siècle du temps des Ghjiuvannali, les « Cathares corses », comme le pensent certain. Nichée dans la verdure, l’église piévane de Carbini constituait à l’époque paléochrétienne et au moyen âge le lieu d’un vaste espace de foi et de spiritualité. Prosper Mérimée fut l’un des artisans de la restauration de San Giovanni Battista Carbini. Voici ce qu’il écrivait en 1839 : « Le clocher très svelte et élégant produit un effet admirable dans le paysage, lorsqu’éclairé par le soleil couchant, il se détache sur les montagnes environnantes ».
L’église fut le réceptacle d’une foi que le Vatican combattit de toutes ses forces, car elle représentait une dissidence au beau milieu de XIVe. La secte des Ghjiuvannali, émanation d’une confrérie franciscaine et constituée d’une centaine de membres à ses débuts, s’opposa à l’ordre des évêques à l’apparat trop riche et à la forte puissance. L’évêque d’Aléria excommunia les Ghjuvannali sans résultat et leurs paroles prirent un écho dans d’autres régions de l’île. Prêchant la pauvreté et la désobéissance, ils furent exterminés sur ordre d’un commissaire envoyé par le pape. C’est au pied de Ghisoni que le dernier groupe fut brulé. Au moment où les buchers allaient s’embraser, un prêtre ému par la foi des suppliciés entonna devant la foule l’office des morts.
On rapporte encore une légende sur le campanile : « les habitants voulaient tellement un clocher exceptionnel (la tradition veut qu’il ait eu 7 étages à l’origine) qu’ils avaient fait appel à un architecte réputé, Maestro Maternato, venu de Forciolo dans le Taravo. Pour que l’œuvre reste unique en Corse, ils avaient conçu le dessein d’éliminer le maître d’œuvre à la fin des travaux ; ce dernier ayant eu vent du projet adopta alors la ruse de Pénélope, défaisant son travail au fur et à mesure pour finir par dire qu’il lui manquait des outils indispensables, laissés à son village. Il obtint alors d’envoyer 5 notables de Carbini à Forciolo, où ils furent reçus par sa famille, qui fut informée par un message et comprit qu’il fallait les garder en otages pour assurer la sécurité du maestro jusqu’à la fin… et le paiement du travail »
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