Il est des territoires qui ne se révèlent jamais autant que depuis la mer. La Corse, île de granit, de forêts profondes et de montagnes suspendues, se découvre aussi dans la lenteur d’un sillage, dans le souffle du vent dans les voiles, dans le clapotis d’une coque effleurant une eau limpide. Embarquer à bord d’un catamaran autour de la Corse, c’est choisir un autre rythme, un autre regard. C’est se glisser dans le paysage plutôt que de le dominer, l’approcher avec respect, le contempler sans le troubler.
Les excursions en catamaran offrent à ceux qui osent s’éloigner des ports une expérience rare. Loin des routes sinueuses, des plages bondées ou des sentiers battus, la mer ouvre une voie de silence et de lumière. Chaque escale devient une parenthèse, chaque mouillage une immersion. Dans une crique inaccessible à pied, face à une falaise rougeoyante, sous une cascade d’écume, le voyage prend des airs de découverte première.
Sur la côte ouest, le golfe de Porto se déploie comme une peinture à ciel ouvert. Les calanques de Piana, classées au patrimoine mondial de l’UNESCO, dressent leurs aiguilles de porphyre rose au-dessus des flots. Le catamaran glisse lentement, frôle les falaises, s’enfonce dans des grottes marines où le soleil filtre par des meurtrières naturelles. Là, les passagers se taisent. Le silence est total, sauf celui des vagues qui claquent doucement sur la pierre. Puis vient le moment du mouillage, dans une anse déserte, entre deux géants de granit. On plonge dans une mer fraîche, limpide, irréelle. Loin derrière, le monde semble s’être effacé.

Plus au sud, autour de Propriano, les itinéraires en catamaran se font plus intimes, plus secrets. La côte y est moins haute, mais toute aussi fascinante. Les criques s’y succèdent, bordées de pins penchés, de rochers lissés par les vents. On ancre près de Campomoro ou dans les eaux turquoise du golfe de Valinco, puis on débarque sur une plage que l’on croirait encore inconnue. À bord, le rythme est celui du soleil, lever paisible, baignade matinale, déjeuner sur le pont, sieste à l’ombre de la voile. Parfois, un dauphin s’approche, curieux. Les visages s’éclairent, les enfants pointent du doigt. Ce sont des moments suspendus, que l’on n’oublie pas.
En Corse du Sud, la navigation prend des airs de féérie. De Bonifacio à Porto-Vecchio, les catamarans longent une côte ciselée par le temps, entre falaises de calcaire et plages ourlées de sable blanc. Depuis la mer, la ville de Bonifacio surgit, accrochée à sa falaise, comme un mirage architectural. Le catamaran s’approche lentement, passe sous l’escalier du roi d’Aragon, frôle la grotte Saint-Antoine, puis file vers les Bouches. Là, le vent s’accélère. Les voiles se tendent. La Sardaigne apparaît à l’horizon, comme un écho lointain. On jette l’ancre dans la baie de Piantarella, face aux îles Lavezzi. Le lagon est d’un bleu éclatant, presque surnaturel. On nage au milieu des poissons, on explore les rochers polis, on s’endort sur le trampoline du catamaran, bercé par le roulis.

Mais la Corse, ce n’est pas seulement le sud ou l’ouest. Le cap Corse, au nord, se découvre lui aussi par la mer, dans une ambiance plus sauvage, plus brute. Depuis Saint-Florent, on met le cap sur le désert des Agriates, ses criques inaccessibles, ses plages blondes bordées de montagnes noires. Le catamaran devient un refuge flottant, un observatoire silencieux. La nature y est souveraine. À chaque escale, on découvre une nouvelle facette de l’île, un village perché au loin, une tour génoise en sentinelle, une plage ourlée d’algues rouges. Le soir, on dîne à bord, à la lueur des lanternes. Le vin est local, le poisson fraîchement pêché, l’ambiance douce. Le silence se fait complice.
L’une des plus belles activités reste sans doute une croisière de plusieurs jours, en itinérance. De Calvi à Ajaccio, de Bastia à Bonifacio, les itinéraires en catamaran permettent de longer l’île dans toute sa majesté. On découvre alors une Corse que la route ne montre jamais, celle des villages isolés, des criques oubliées, des falaises inaccessibles. On dort à bord, bercé par les clapotis, réveillé par le cri des goélands. Les journées se construisent entre exploration, détente, baignade, lecture, et repas partagés. Le catamaran devient une maison nomade, un cocon flottant, une fenêtre ouverte sur la beauté pure.
La navigation à la voile a ceci de particulier qu’elle oblige à la lenteur. On ne peut pas forcer le vent. On s’y adapte. On apprend à écouter, à observer. C’est cette lenteur, cette disponibilité à l’instant, qui transforme l’excursion en expérience. En Corse, où la mer est partout, où la lumière change à chaque heure, cette forme de voyage prend tout son sens.
Chaque port de Corse propose désormais des excursions en catamaran, de la sortie à la journée à la croisière de plusieurs nuits. Les équipages sont souvent locaux, amoureux de leur île, soucieux de transmettre ses beautés sans la dénaturer. On y apprend à reconnaître les vents, les nuages, les oiseaux. On y écoute des récits de pêcheurs, des anecdotes de corsaires, des légendes nées dans les grottes ou les tours.
Et c’est peut-être là, dans ce partage silencieux entre mer et montagne, que réside la magie des excursions en catamaran autour de la Corse. Une île que l’on croyait connaître, mais qui, vue depuis l’eau, dévoile une tout autre histoire. Une histoire faite de lumière, de silence, d’infini.
Les apéritifs au coucher du soleil à L’Île-Rousse et les Îles rouges, un crépuscule doré sur la mer corse
Sur la côte nord-ouest de la Corse, L’Île-Rousse déploie ses pavés pâles et ses palmiers balancés par le vent face à un horizon ouvert, scintillant à l’heure dorée. C’est dans ce décor à la fois méditerranéen et presque saharien que les catamarans jettent l’ancre en fin d’après-midi, au pied des îles rouges, ce chapelet de granit ocre qui donne son nom à la cité fondée par Pascal Paoli.
Lorsque le soleil commence sa lente descente vers la mer, tout s’apaise. Les voiles se replient, le moteur se tait, et le silence marin s’installe, troublé seulement par le rire feutré des convives et le clapotis de la mer contre la coque. À bord, un verre de vin blanc corse à la main, quelques tranches de lonzu ou de fromage de brebis posées sur une ardoise, les passagers savourent l’instant. La lumière rase les crêtes, embrase les îlots rouges, et transforme le paysage en toile impressionniste mouvante.

C’est un moment de pure harmonie, suspendu entre ciel et mer, entre l’ombre naissante des collines du Balagne et la chaleur résiduelle du jour. L’Île-Rousse devient alors un tableau vivant, vu depuis le large, à l’heure où les ruelles s’animent, où les voiliers rentrent lentement au port. Ces apéritifs marins, simples et majestueux, font partie des instants que seule la Corse sait offrir. Ils marquent l’âme autant que le palais, et laissent dans les mémoires une trace lumineuse et douce.
Ajaccio et les Îles Sanguinaires, apéritifs d’embruns et d’oranges ardentes
À l’autre bout de l’île, sur la côte ouest, Ajaccio se déploie autour de sa baie immense, dans une lumière qui, au crépuscule, devient incandescent. Depuis le port Tino Rossi, les catamarans prennent doucement le large en fin d’après-midi, cap au nord-ouest, vers les mythiques Îles Sanguinaires. Ces îlots sombres et escarpés, battus par les vents et cernés de récifs, doivent leur nom à la teinte sanglante qu’ils prennent au moment précis où le soleil touche l’horizon.

C’est là, entre la côte ocre et les îles noires, que les apéritifs en catamaran prennent une dimension presque mystique. Le bateau s’immobilise dans une anse calme, les passagers s’installent sur les filets ou à la proue, tandis qu’un apéritif local est servi, muscat pétillant, rosé de Sciaccarellu, figatellu grillé ou tapenade d’olives noires. La mer se pare alors de cuivre et d’or, les îles se découpent comme des ombres chinoises, et Ajaccio, au loin, s’illumine une à une.
À cet instant précis, la Corse s’offre dans toute sa splendeur. Ni tout à fait sauvage, ni complètement urbaine, mais puissamment poétique. Les voiles claquent doucement, les verres tintent, et les visages s’illuminent. Ce ne sont pas de simples apéritifs. Ce sont des cérémonies solaires, des rituels d’admiration, des pauses sacrées face à la beauté brute de l’île. Un souvenir en apesanteur, à vivre au moins une fois dans sa vie.
Catamarans ou semi-rigides, deux visions de la mer corse
Sur les flots corses, le choix de l’embarcation ne relève pas seulement du confort. Il détermine une manière d’aborder la mer, de ressentir les paysages, de dialoguer avec l’île. Le catamaran, avec sa double coque stable et sa surface généreuse, incarne la lenteur, la contemplation, la fluidité. Le semi-rigide, nerveux, léger, rapide, évoque l’exploration, l’adrénaline, l’aventure directe.
Choisir un catamaran en Corse, c’est embrasser l’élégance d’une navigation silencieuse, où le vent devient moteur et le pont, salon flottant. Les espaces y sont ouverts, filets tendus au-dessus des vagues, bains de soleil, ombre et lumière alternées, cuisine embarquée, cabines si l’on part pour plusieurs jours. Le catamaran invite à la détente, au partage, à la déconnexion. Il épouse la mer, ne la traverse pas. Il permet de s’attarder, de s’immerger, de vivre à bord.

Le semi-rigide, en revanche, permet de couvrir plus de distance en moins de temps. Parfait pour les sorties express, il permet d’accéder à des criques très reculées, de jouer avec les vagues, de sauter de roche en roche. Plus sportif, plus mobile, il attire une autre tribu de voyageurs, avides de sensations, de vitesse et d’expéditions ponctuelles. Moins de confort, mais plus d’action.
Entre les deux, il n’y a pas de meilleur choix. Juste une autre façon d’habiter la mer corse. L’une invite au calme et à la contemplation. L’autre à l’élan et à la découverte immédiate. Deux visions complémentaires d’une île plurielle, où chaque rivage appelle une nouvelle manière de naviguer.

Voguer en catamaran, redécouvrir la Corse par la mer
Explorer la Corse en catamaran, c’est renoncer aux itinéraires tout tracés pour suivre le chemin de l’eau, là où les routes s’effacent, là où l’île retrouve son visage originel. C’est opter pour la douceur d’une navigation sans heurt, bercée par le souffle du vent et le rythme tranquille des marées. Sur le pont d’un catamaran, le regard s’ouvre, le temps s’étire, et l’île se dévoile autrement, plus sauvage, plus intime, plus pure.
Des calanques de Piana aux îles Lavezzi, des criques oubliées du Cap Corse aux couchers de soleil sur les Îles Sanguinaires, chaque escale devient un tableau vivant, chaque mouillage une pause poétique. Le catamaran offre une expérience sensorielle totale, où la lumière, les odeurs du maquis, le goût du sel et le silence de la mer composent une symphonie discrète, mais inoubliable.
Car la Corse, vue depuis la mer, n’est pas simplement belle. Elle est majestueuse, mystérieuse, infiniment vibrante. Et ceux qui la parcourent à la voile en reviennent changés, porteurs d’une émotion rare, d’un lien profond avec cette terre insulaire qui, plus qu’un décor, devient un souffle. Naviguer autour de la Corse, c’est donc bien plus qu’une excursion. C’est un privilège, un art de vivre, une invitation au respect et à la lenteur. Une promesse aussi, celle, silencieuse et lumineuse, d’y revenir, encore, et encore.
